J'avais appris à sécher mes larmes, j'essaie maintenant de les laisser couler quand le brouillard emplit mes pensées. J'ai parlé de mon cœur essoré à une dame le samedi après midi qui me dit et me répète d'être indulgente avec moi même. J'apprends à faire la paix. J'ai serré dans mes bras parce que je n'avais plus les mots, j'ai caressé des cheveux avec tout l'amour du monde pendant une éternité, lissant les bouclettes de ma petite cousine qui ne fêtera plus jamais un anniversaire avec son père. J'ai cuisiné, plus que de raison, parce que c'est la seule chose que mes mains savent faire pour calmer les pensées qui cavalent. J'ai aimé, je crois, sans crainte, et été aimée en retour. J'ai serré sa main à Bordeaux en nous imaginant aller au CHU à vélo dans un futur qui n'existera probablement pas mais qu'il est doux d'inventer, je l'ai emmené dans un salon de thé à Lyon et j'ai ri de sa tête terrorisée par cet univers totalement inconnu et rooose. J'ai travaillé, comme toujours, comme à chaque fois, mais moins bien que les années précédentes. Et tant pis. J'ai appris que ce n'était pas (plus) une priorité. J'ai été éteinte par une tonne de matins passés au bloc, eu le ventre tordu et le cœur serré, puis j'ai rencontré des chefs qui connaissaient mon prénom le premier jour. J'ai été agrippée par de toutes toutes toutes petites mains, on m'a chuchoté qu'on ne m'oublierai pas, j'ai consolé câliné porté changé examiné et quelqu'un m'a dit merci. J'ai accueilli des amies de la fausse vie et plein d'enfants dans ma maison (et même un Poc encore couvé) et on n'a même pas parlé que de médecine. Je suis allée à l'autre bout du monde et eu le souffle coupé. J'ai mangé une gaufre de liège sur les Champs Élysées parce que ce soir là j'avais besoin de me sentir en vie. J'ai marché vite des kilomètres de couloirs d'hôpital et dit bonjour à tout le monde avec ma blouse, bonjour à personne une fois redevenue civile. J'ai accroché une étoile lumineuse dénichée par P. dans ma chambre et je me suis offert un bracelet d'anniversaire. A nos amours, à ceux qu'on nous a enlevés.
J'ai vingt trois ans, je vais résister & croire aux miracles.